Une classe de 2° sur les traces des migrations d’hier et d’aujourd’hui (partie 2)

Pour poursuivre leur projet sur “Les migrations d’hier et d’aujourd’hui”, les élèves de 2de11 du lycée ont eu la chance d’assister lundi 13 décembre 2021 à une conférence passionnante et émouvante donnée par Monsieur Jean Rodgold.

Ancien enfant caché sous l’Occupation, M. Rodgold a raconté aux élèves quel fut son vécu pendant ces années douloureuses : l’arrivée de son père en France à pieds par la Belgique en 1932, le permis de séjour obtenu par sa mère grâce à la naissance de ses jumelles en France, les différentes mesures prises au fil des ans par les Allemands puis les Français contre les juifs, comment son père faisait passer les lettres depuis le service des colis du camp de Beaune-La-Rolande, dans lequel il s’est trouvé interné, pour que les prisonniers s’évadent…

Le petit Jean n’a que 4 ans lorsque la famille fuit en zone libre…

Son témoignage s’appuie sur ses souvenirs et sur un échange de lettres entre son père et ses 5 enfants, tenus de dire que tout allait bien pour que les missives ne soient pas censurées, même s’ils étaient tous conscients de ce qui se passait…

M. Rodgold explique ainsi à la jeune génération d’aujourd’hui les injustices du quotidien. Par exemple, l’interdiction pour les Juifs de se rendre au cinéma, dans les lieux culturels… ou l’existence de pancartes interdisant aux enfants juifs, tout comme aux chiens, d’aller dans les parcs de jeux. Alors le petit Jean, comme les autres enfants, s’amusait dans les rues ou au cimetière, malgré sa peur panique que les morts l’emmènent pendant qu’il y jouait à cache-cache.

Il raconte aussi comment, une fois son père déporté à Auschwitz, un silence total se faisait chaque soir à 21h autour de la table familiale. L’assiette du père était toujours en place et chacun lui parlait dans sa tête. Et, depuis le camp, le père de famille faisait de même. Aujourd’hui adulte, notre témoin se souvient encore de ses oreilles qui bourdonnaient le soir à 9h… : il entendait son père…

Il évoque ensuite la rafle du Vel’d’Hiv, à laquelle la petite famille a réussi à échapper grâce à une ruse de la mère, qui a demandé aux gendarmes de revenir une heure après, le temps de préparer les valises, permettant ainsi à tous de se cacher chez les voisins.

 

Puis la famille a pris le train pour passer en zone libre grâce aux cartes d’alimentation d’une famille italienne. Une partie a voyagé à l’avant du train, une autre à l’arrière pour ne pas éveiller les soupçons. Le petit Jean, 4 ans, devait se rendre régulièrement à l’autre bout du train, tout seul, pour voir si personne ne manquait à l’appel… Il a lui-même échappé aux contrôles grâce à un milicien qui l’a fait voyager sur ses genoux. Arrivés le 1e août 1942, ils ont tous logé dans un grenier de trois pièces à Issoudun dans des conditions extrêmes puis une famille à Buzençais a accepté de cacher les jumelles et Jean. Chacun a survécu grâce à la solidarité de divers commerçants.

Le petit Jean s’est par la suite retrouvé chez une institutrice, seul sans ses frères et sœurs, pour la première fois, et il a sangloté pendant trois jours…

Leur père, 33 ans, n’est malheureusement jamais revenu d’Auschwitz. Son acte de décès indique “crise cardiaque”, mention inscrite lorsque les internés se révoltaient et étaient tués…

Ce témoignage a été l’occasion pour nos élèves de se rendre compte de la vie qu’ont dû mener les familles juives sous l’Occupation. Malgré son vécu terrible, M. Rodgold reconnaît que les siens ont eu « de la chance » car ils ont rencontré des gens bienveillants tout au long de cette période et la solidarité les a sauvés. Mais tous les Juifs et les enfants cachés n’ont malheureusement pas été aussi bien traités…

Cette rencontre a été ponctuée de moments de grands silences chez les élèves, signes de leur émotion.

Outre des documents plus personnels, M. Rodgold s’est aussi appuyé sur des documents administratifs comme les ordonnances françaises et allemandes, ce qui a permis aux 2°11 de faire des parallèles avec la conférence de lundi dernier, lors de laquelle M. Doulut et de Mme Labeau leur avait apporté un éclairage historique.

Après le récit d’un enfant caché, le projet se poursuivra mercredi 15 décembre avec la rencontre de M. Ceruti, petit-fils de Joséphine Ceruti. C’est en effet cette figure féminine issue de l’immigration italienne et élevée au titre de Juste parmi les Nations que la classe a choisie pour réaliser son court-métrage. 

Quel projet enrichissant pour tous et toutes !

Une classe de 2° sur les traces des migrations d’hier et d’aujourd’hui (partie 1)
Une classe de 2° sur les traces des migrations d’hier et d’aujourd’hui (partie 3)